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CENSURE & CINEMA

CENSURE & CINEMA

Collection Darkness, censure et cinéma


Pourtant autorisé pour tous publics avec avertissement au cinéma, l'Arcom demande que 120 battements par minute soit déconseillé aux moins de 12 ans à la télévision

Publié par darkness-fanzine.over-blog.com sur 28 Mai 2022, 09:00am

Catégories : #Censure, #Interdiction, #Arcom, #120 battements par minute, #OCS

Après s’être réunie en assemblée plénière le 30 mars 2022 suite à un signalement l’alertant de l’insuffisance de la signalétique « déconseillé aux moins de 10 ans » mise en place par OCS City pour la diffusion du film 120 battements par minute (Robin Campillo, 2017) le 20 décembre 2021 à 16h10, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), après avoir rappelé que, selon l’article 2 de la recommandation du 7 juin 2005 aux éditeurs de services de télévision concernant la signalétique jeunesse et la classification des programmes, la classification en catégorie II correspond aux programmes « comportant certaines scènes susceptibles de heurter les mineurs de 10 ans », et la classification en catégorie III s’applique quant à elle aux « œuvres cinématographiques interdites aux mineurs de 12 ans ainsi [qu’aux] programmes pouvant troubler les mineurs de 12 ans, notamment lorsque le programme recourt de façon répétée à la violence physique ou psychologique », a estimé dans une décision mise en ligne le 5 mai 2022, que ce film, « en raison de son climat psychologiquement éprouvant marqué par l’omniprésence de la maladie et de la mort et de la présence de scènes susceptibles de troubler les mineurs de 12 ans, relevait de la catégorie III », demandant de ce fait à la chaîne d’appliquer la signalétique correspondant à cette catégorie en cas de rediffusion et ce, alors même que le film a été classé « tous publics avec avertissement » par la commission de classification des œuvres cinématographiques pour son exploitation en salles le 23 août 2017. Une décision qui peut paraître surprenante alors que, le 17 mai 2022 sur son site, l’Arcom réaffirmait son engagement pour la diversité et l'inclusivité et contre les discriminations.

Ceci étant dit, il faut cependant préciser que dans son rapport annuel en 2007, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) aujourd’hui remplacé par l’Arcom, a rappelé que l’une de ses missions consiste à veiller « à ce que la classification attribuée aux films lors de leur sortie en salles soit renforcée par les chaînes de télévision lors de la diffusion de l’œuvre à la télévision, lorsque cela est nécessaire, comme le prévoit l’article 2 de la recommandation du 7 juin 2005 sur la classification des programmes et la signalétique jeunesse [modifiée le 23 octobre 2012 et le 5 mars 2014]. Cela se justifie par la nécessaire prise en compte du contexte de visionnage, différent au cinéma et à la télévision, et par la portée de chacune de ces mesures de classification. Dans le cas d’une projection en salles, le téléspectateur effectue la démarche de se rendre au cinéma, alors qu’une diffusion à la télévision accroît le risque d’exposition des mineurs à des programmes qui ne leur sont pas adaptés, ce qui peut justifier un éventuel renforcement de la classification. Par ailleurs, alors que le visa pris par le ministre de la Culture conditionne le droit d’accès des mineurs aux salles de projection et qu’il peut énoncer une interdiction d’accès, la signalétique apposée par les chaînes consiste simplement à déconseiller certains programmes et à adapter l’horaire de diffusion à leur contenu, mesure moins contraignante par ses effets et qui peut donc justifier une classification plus protectrice du jeune public. »

Notons que l’ordonnance du 21 décembre 2020 portant transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018, a modifié certains articles de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Il est mentionné que le CSA, donc aujourd’hui l’Arcom, ne doit donc plus seulement « veiller » mais dorénavant « s’assurer » de l’application des règles permettant de protéger l'enfance et l'adolescence, et de respecter la dignité de la personne dans les programmes mis à disposition du public par un service de communication audiovisuelle. Une surveillance stricte qui s’applique à tous les programmes y compris les séries télévisées et les œuvres cinématographiques diffusées par un service de télévision ou de médias audiovisuels à la demande.

Dans un article mis en ligne sur le site bfmbusiness.bfmtv.com le 9 juillet 2016, Jamal Henni dénonce ce système, qualifiant même le CSA de « père la pudeur » :

Le gendarme de l'audiovisuel applique aux films diffusés à la télévision une classification plus restrictive que celle utilisée lors de la sortie en salles. […] Le choix [de l'âge] est effectué par la chaîne. Toutefois, un contrôle après diffusion du film est effectué par le CSA. Si ce dernier estime que la chaîne a été trop laxiste, alors il peut taper sur les doigts de la chaîne, sous la forme d'un courrier, ou, plus rarement, sous la forme d'une sanction » comme il l'a fait par exemple à l'encontre de la chaîne Antenne Réunion (décision CSA, assemblée plénière du 25 septembre 2007) après la diffusion, le 14 juin 2007 à 19h55 du film La Proie de J-F. Lawton, accompagné d'une signalétique de catégorie II (déconseillé aux moins de 10 ans) alors que, pour sa sortie en salles, le film avait fait l'objet d'une interdiction aux -12 ans. Même chose le 19 février 2009 (décision CSA, assemblée plénière du 24 novembre 2009) à l'endroit de Ciné Cinéma Premier après la diffusion à 22 heures du film Apocalypto de Mel Gibson, avec une signalétique de catégorie III (déconseillé aux moins de 12 ans) alors que, selon le CSA, les très nombreuses scènes de violence qu'il comporte justifiaient une classification en catégorie IV (déconseillé aux moins de 16 ans). Une dernière décision qui a pu surprendre, puisque bien plus sévère que celle de la Commission de classification qui avait proposé au ministre une interdiction aux moins de 12 ans pour sa sortie en salles en janvier 2007 : « La Commission recommande pour ce film une interdiction aux mineurs de moins de douze ans, en raison des très nombreuses scènes de violence.

Et Jamal Henni de dérouler une poursuivre la lecture de sa longue liste d’exemples :

C'est ce qui est arrivé aux Kaïra de Franck Gastambide, que le CSA déconseille aux moins de 12 ans « compte tenu de la crudité du langage, de la présence de plusieurs scènes à caractère sexuel et de l’évocation de l’univers de la pornographie ». De même, pour le teen movie américain Supergrave produit par Judd Apatow, en raison de « scènes et propos à connotation sexuelle », dixit le CSA. Ou encore Polisse de Maïwenn, car il parle « pédophilie, inceste, mariage forcé et prostitution ». Idem pour le polar 7h58 ce samedi là de Sidney Lumet, en raison de « scènes de violence, qui se déroulent dans un cadre familial ». Ou encore le film d'espionnage Mensonges d’État de Ridley Scott, en raison de « scènes de torture ». Ou bien le film de guerre Les messagers du vent de John Woo, à cause de « scènes de combats très réalistes ». Même punition pour Le Serpent d'Eric Barbier, au prétexte du « climat angoissant, des scènes de violence et de l'implication d'enfants mis en danger ». Ou encore le thriller Harry, un ami qui vous veut du bien de Dominik Moll, au prétexte de « scènes et situations angoissantes ».

Une situation vivement critiquée par les professionnels du cinéma, tel Gaspar Noé durant les 25èmes Rencontres cinématographiques de Dijon en octobre 2015 : « Sous un gouvernement de droite comme celui de Giscard, je voyais à 20h30 à la télévision des films comme Délivrance, Taxi Driver, Les Chiens de paille ou Portier de nuit. Il y avait juste un petit carré blanc. A l'époque, la télé prenait les gens pour des adultes. Des millions des gens les ont vus. La France s'en est très bien portée... »

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