YouTube supprime la chaîne d’un internaute après la mise en ligne d’une vidéo sur le film Shortbus

Le 23 janvier 2023, désemparé, le responsable d’une chaîne YouTube sur le cinéma nous apprend via Twitter la fermeture unilatérale de son compte et la disparition corrélative de ses 45 000 abonnés après qu’il ait mis en ligne une vidéo analysant le film américain Shortbus réalisé par John Cameron Mitchell en 2006  :

« Hier, j’ai sorti une vidéo où je parlais de Shortbus, un film conseillé par un abonné, un film qui parle de sexe, entre autres. Hier, suite à cette vidéo, YouTube a supprimé ma chaîne de 45 000 abonnés. Des années de travail, des heures de contenu. Je n’ai reçu aucun avertissement préalable. La vidéo était en ligne en privé depuis jeudi, pendant quatre jours, pour voir si YouTube voyait un problème. Aucun problème. Elle était même monétisée. Pourquoi ne m’avoir pas prévenu à ce moment ? J’aurais supprimé la vidéo.. J’apprends alors qu’Intercut n’existe plus. C’était 90 % de ma vie, C’était mon projet futur, professionnel, tout ce qui me faisait avancer. Le fait que YouTube m’enlève ça sans essayer de résoudre le,problème me tue. Je viens de perdre trois ans de travail. Un avertissement, un message aurait suffi. Je suis tétanisé. Sans solution. Je ne sais pas comment me relever. »

Après l’indignation de nombreux internautes sur les réseaux sociaux et des prises de contact répétées avec YouTube France, le géant de l’hébergement de vidéos en streaming a fini par réagir rapidement, indiquant que ses équipes étudiaient le dossier.

Alors quel est le problème, et que reproche-t-on à Intercut ? Une violation du droit d’auteur, la vidéo reproduisant sans doute des extraits et des images tirés du film sans aucune autorisation des ayants droit, comme le fait quotidiennement la toile tout entière depuis l’apparition d’Internet ? Non, pas du tout. En revanche, la nudité incitative... c’est une autre affaire !

Comme sur Facebook, le règlement de la communauté YouTube est très clair concernant la nudité assimilée pour l’occasion à la pornographie : « Tout contenu explicite destiné à être sexuellement gratifiant est interdit sur YouTube. Si vous publiez des contenus à caractère pornographique, ils peuvent être supprimés, et votre chaîne risque d'être clôturée. » Pas de définition de la pornographie, mais un peu plus bas il est écrit : « Ne publiez pas de contenu sur YouTube s'il correspond à l'une des descriptions ci-dessous : représentations de parties génitales, de poitrine ou de fesses vêtues ou non à des fins de gratification sexuelle ; pornographie, représentations d'actes sexuels ou scènes de fétichisme à des fins de gratification sexuelle. » Bon, c’est un peu plus clair. Et puis des exceptions semblent toutefois permises, dans certains cas, YouTube imposant alors les contenus à une limite d’âge, laquelle n’est évidemment soumise à aucune vérification si ce n’est une simple déclaration, même pas sur l’honneur : « Nous pouvons soumettre des contenus à une limite d'âge s'ils comprennent de la nudité ou tout autre contenu à caractère sexuel, mais n'incluent aucun des éléments listés ci-dessus. Nous prenons en compte les éléments suivants pour déterminer s'il convient de soumettre un contenu à une limite d'âge ou de le supprimer : la poitrine, les fesses ou les parties génitales vêtues ou non sont-elles le point central de la vidéo ? Le sujet est-il représenté dans une position destinée à exciter sexuellement l'internaute ? Le langage utilisé dans la vidéo est-il explicite et/ou obscène ? [...] » Une précaution que ne semble pas avoir pris notre internaute. Bien sûr, tout cela n’est pas encadré, pas d’avertissement préalable non plus ni même de discussion obligatoire en cas de litige.

Notons que plus loin dans le règlement, YouTube précise cependant : « Nous pouvons autoriser la nudité si l'objectif premier est éducatif, documentaire, scientifique ou artistique, et si les images permettent d'illustrer le contenu. […] Il en va de même pour les représentations de scènes de sexe dans les contenus artistiques comme les films, les contenus audio, la musique ou les jeux vidéo. » et de répéter : « Les contenus qui respectent nos règles mais qui ne sont pas adaptés à tous les publics sont soumis à une limite d'âge. Les contenus soumis à une limite d'âge ne sont pas visibles par les internautes de moins de 18 ans ni par les utilisateurs non connectés », en donnant des exemples non exhaustifs dont les « extraits de films, d'émissions ou autres contenus non pornographiques isolant les contenus à caractère sexuel (réels ou artistiques) ».

Bref, même si, paradoxalement, il est possible et très facile de trouver le film complet, de débusquer de nombreuses vidéos parlant de Shortbus sur YouTube comme un trailer du film qui, dès les premières secondes, montre une scène explicite d’orgie, il est reproché au YouTubeur de n’avoir pas respecté les conditions contractuelles qui le lient à YouTube. Malgré tout, après avoir examiné la situation, YouTube a fini par revoir sa position en autorisant de nouveau la chaîne Intercut le 24 janvier 2023, évidemment expurgée de la vidéo controversée.

Tous les cinéphiles sont désormais avertis !