En Thaïlande, la justice lève l’interdiction de Shakespeare Must Die et condamne l’État

Après plus de 11 ans d’interdiction totale en Thaïlande et un rejet de l’affaire par la justice administrative en 2017, le producteur de Shakespeare Must Die (Ing Kanjanavanit, 2012) vient finalement de remporter une longue bataille devant les tribunaux. Le 20 février 2024 en effet, la Cour administrative suprême - un peu l’équivalent du Conseil d’État - a non seulement ordonné la levée de l’interdiction mais également condamné le ministère de la Culture à indemniser les dommages nés de la décision du Censorship Board.

En 2010, le projet qui propose une adaptation contemporaine et personnelle de la célèbre pièce de William Shakespeare - l'histoire de Mekhdeth, un noble qui, après avoir renversé le Roi, obsédé par le pouvoir, tue ses rivaux pour le conserver -, reçoit le soutien financier du Film Promotion Fund et du ministère de la Culture avant d’être interdit le 3 octobre 2012 par le Censorship Board qui dépend du même ministère, lequel n’apprécie guère les références aux événements du 6 octobre 1976 durant lesquels les forces de police thaïlandaises et les paramilitaires d'extrême-droite ont violemment réprimé un cortège pacifique d'étudiants à l'université Thammasat, faisant officiellement 46 morts et 67 blessés.

L’intérêt de cette décision réside aussi dans la condamnation du Censorship Board à « compenser les pertes » engendrées par son interdiction. Un dispositif qui, à notre connaissance, n’a jamais été mis en œuvre en France. Ce dont nous vous parlions dans l’article « Exploitation d’un film en salles. Quelle réparation du préjudice en cas de restriction ou d’interdiction ? » publié dans le 6^e volume de notre collection Censure & cinéma en France.