Au terme de huit années de procédure, le Conseil d'Etat vient de confirmer définitivement l'appréciation portée par l'association Promouvoir sur Antichrist, estimant que le film de Lars von Trier doit être interdit aux moins de 18 ans.
Rappel des épisodes précédents
Le 2 juin 2009, Frédéric Mitterrand décide de suivre l'avis de la Commission et interdit Antichrist (2009, Lars van Trier) aux mineurs de 16 ans en raison de son « climat de violence ». Contestant la décision ministérielle, les associations Promouvoir, Action pour la dignité humaine et le Comité protestant évangélique pour la dignité humaine forment un recours devant le Conseil d’État. Le juge administratif fait droit à leur demande et annule le visa ministériel le 25 novembre 2009 estimant que le ministre n'a pas suffisamment motivé sa décision en ne précisant pas en quoi la violence visée justifiait un tel niveau d'interdiction. Dès le lendemain, Frédéric Mitterrand délivre un nouveau visa comportant toujours l'interdiction de représentation aux mineurs de 16 ans motivée par les « quelques brèves scènes de sexe non simulées » et « d'autres séquences » traduisant « la violence des rapports entre les deux personnages ». Les 21 et 25 janvier 2010, les associations Promouvoir et Action pour la dignité humaine contestent de nouveau la décision du ministre. Le 29 juin 2012, le Conseil d’État annule pour la seconde fois le visa ministériel expliquant que l'interdiction aux mineurs de 16 ans manque toujours de véritable motivation, le « climat de violence » n'étant pas clairement caractérisé. Plus exactement, le Conseil d’État censure le fait que le ministre s'est appuyé sur l'avis insuffisamment motivé de la Commission. Sans visa d'exploitation, Antichrist est de nouveau interdit de projection dans les salles françaises.
Le 3 août 2012, Aurélie Filippetti décide de suivre une nouvelle fois l'avis de la Commission de classification. Elle maintient l'interdiction du film de Lars von Trier aux moins de 16 ans en expliquant que les « brèves scènes de sexe non simulées » et les séquences traduisant « la violence des rapports entre les entre les deux personnages » ne justifient pas une interdiction aux mineurs « en raison du fait qu'elles n'occupent qu'une place limitée dans le film et se déroulent dans une atmosphère qui en relativise la portée. » Mais la cour administrative d'appel de Paris ne l'entend pas ainsi.
Le juge annule le visa aux mineurs de 16 ans du film le 2 février 2016, et sanctionne la contradiction entre la motivation de la décision ministérielle de classement et le niveau d'interdiction jugé insuffisant. On se souvient que dans l'affaire Saw 3D, le juge avait déjà comparé la motivation littérale de l'interdiction avec l'article R.211-12 du Code du cinéma et de l'image animée. Ainsi pour le juge, le libellé de l'avertissement accompagnant l'interdiction aux moins de 16 ans d'Antichrist expliquant aux spectateurs que le film comporte « quelques brèves scènes de sexe non simulées tandis que d'autres séquences traduisent la violence des rapports entre les entre les deux personnages » impose nécessairement son interdiction à tous les mineurs. En désaccord avec les juges du fond, la ministre forme un pourvoi en cassation.
Le 13 janvier 2017, le Conseil d’État a rejeté le pourvoi estimant que les scènes de très grande violence, filmées de manière réaliste, à l’occasion de pratiques sexuelles filmées sans aucune dissimulation dont, notamment, une scène d’automutilation sexuelle féminine filmée en gros plan justifient l'interdiction du film Antichrist à tous les mineurs.
Fin de l'histoire.