
On apprend que le Conseil d’État vient tout juste d'annuler l'interdiction aux moins de 18 ans du documentaire Salafistes (Lemine Ould Salem et François Margolin, 2015). Mais est-ce vraiment la fin d'un long feuilleton administratif ?
Depuis les attentats de Paris de 2015, la Commission de classification demeure particulièrement attentive aux messages et aux amalgames susceptibles d’être véhiculés par un film. Ainsi, reprenant l’avis qui lui a été proposé, la ministre de la Culture décide d’interdire aux mineurs le documentaire Salafistes le 27 janvier 2016, considérant que le film « qui donne sur toute sa durée et de façon exclusive la parole à des responsables salafistes ne permet pas de façon claire de faire la critique des discours violemment anti-occidentaux, anti-démocratiques, de légitimation d’actes terroristes, d’appels au meurtre d’infidèles présentés comme juifs et chrétiens, qui y sont tenus ». Le 18 février 2016, contestant la décision ministérielle devant le tribunal administratif de Paris, la société Margo cinéma obtient en référé la suspension de l'interdiction du film aux mineurs, lequel est provisoirement interdit aux spectateurs de 16 ans par le juge. Si le 12 juillet 2016 le tribunal administratif de Paris valide le référé et annule le visa ministériel, la cour administrative d’appel de Paris estime au contraire, en septembre 2016, en novembre 2017 puis juin 2018, que la présence de « scènes de très grande violence » est un « moyen sérieux et de nature à justifier l’annulation du jugement attaqué ».
Si l'on en croît l'AFP, le Conseil d'État a considéré que si le film « comporte des scènes violentes montrant de nombreuses exactions, assassinats, tortures, amputations, réellement commises » et présente « en parallèle, les propos de plusieurs protagonistes légitimant les actions en cause », il ajoute que « ces scènes s'insèrent de manière cohérente dans le propos du film documentaire, dont l'objet est d'informer le public sur la réalité de la violence salafiste » et qu'en outre, « tant l'avertissement figurant en début de film que la dédicace finale du documentaire aux victimes des attentats du 13 novembre 2015 sont de nature à faire comprendre, y compris par des spectateurs âgés de moins de 18 ans, l'objectif d'information et de dénonciation poursuivi par l’ouvre documentaire. »