
Fayçal Métaoui nous apprend que l’avant-première du film Papicha (2019) de Mounia Meddour, initialement prévue le 21 septembre 2019 à la salle Ibn Zeydoun à Alger, a été « momentanément annulée », selon l’Office Riad El Feth qui annonce la nouvelle sur sa page Facebook. Alors que Redha Talmat-Amar, le directeur du Centre algérien du développement du cinéma (CADC) et coproducteur du long-métrage, confirme l’annulation de la projection de presse et de l’avant-première, Belkacem Hadjadj, coproducteur du film et directeur de la société Tayda Film, s’est dit particulièrement étonné : « J’ai appris la nouvelle par la rumeur. Personne n’a pu me donner d’explication. J’ai demandé à rencontrer le secrétaire général du ministère de la Culture, il ne m’a pas reçu. J’ai envoyé un courrier au ministre de la Communication (qui assure l’intérim du ministère de la Culture) pour attirer son attention sur la situation, car cela risque d’avoir des retombées négatives sur le plan médiatique. Je n’ai pas reçu de réponse pour le moment. Dois-je considérer cela comme de la censure ? Or, ce film a déjà reçu son visa d’exploitation en Algérie. Je ne comprends pas donc. Il y a comme une interdiction que personne ne veut assumer. »
Le lendemain, l’Institut français d’Algérie (IFA) a également annulé les projections du film programmées les 22 et 23 septembre : « Que nos collaborateurs et ami(e)s algériens cinéphiles déçues par cette annulation, indépendante de notre volonté, soient ici assurés de notre sincère sympathie et notre profonde compréhension », a déclaré l’équipe du CADC dans un communiqué de presse.
Rappelons que Papicha a déjà été présenté dans de nombreux festivals à l’étranger, notamment au dernier Festival de Cannes dans la section Un certain regard, au mois de mai 2019, ou encore au dernier festival du film francophone d’Angoulême. Au début du mois de juillet 2019, le film a même été sélectionné pour représenter l’Algérie à la cérémonie des Oscars 2020 dans la catégorie du meilleur film étranger : « Si jamais, on nous empêche de faire l’avant-première maintenant et de le sortir pendant au moins une semaine dans les salles en Algérie avant le 30 septembre 2019, nous allons avoir des problèmes. C’est l’une des conditions pour que le film puisse participer à la course aux Oscars. La décision d’annulation de l’avant-première va complètement saboter la participation algérienne aux Oscars », prévient Belkacem Hadjadj. Le règlement et les critères de sélection pour les Oscars dans la catégorie Meilleur film en langue étrangère imposent en effet une « sortie du film dans le pays qui le soumet entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019 » et ce, « pour une période de sept jours consécutifs dans une salle de cinéma à but commercial ». Le 9 octobre 2019, il semble que l'Académie des Oscars ait exceptionnellement autorisé le film à concourir pour l'Algérie.
La sortie de Papicha, une coproduction entre l’Algérie, la France, la Belgique et le Qatar, est prévue le 9 octobre prochain en France. Le premier film de Mounia Meddour, la fille du réalisateur Azzeddine Meddour décédé en 2000, raconte l’histoire de Nedjma (Lyna Khoudri), une étudiante de 18 ans habitant une cité universitaire qui, dans les années 1990, rêve de devenir styliste. Avec ses camarades, elle quitte le soir la cité pour vendre des créations dans des lieux branchés d’Alger. Elle tente de vivre dans un pays livré aux violences et projette d’organiser un défilé de mode comme une forme de résistance au fanatisme.