L’affaire Sofiane Bennacer embarrasse l’Académie des César et conduit plusieurs cinémas à déprogrammer Les Amandiers

On apprend que Les Amandiers, mis en scène par Valeria Bruni-Tedeschi pour rendre hommage au cinéaste Patrice Chéreau et à son école de Nanterre dans laquelle elle a fait ses classes, a été déprogrammé de plusieurs cinémas suite à quatre plaintes et à la mise en examen de Sofiane Bennacer, en octobre 2022, pour viols et violences perpétrées sur plusieurs de ses anciennes compagnes. L'acteur nie formellement ces accusations et a, à son tour, saisi la justice contre les plaignantes pour diffamation.

Si l’affaire suit son cours, il est reproché à la production de ne pas avoir pris en considération les « rumeurs » qui couraient sur le compte de Sofiane Bennacer dès avant le tournage, certains accusant même la réalisatrice d'avoir « couvert l'acteur ».

Les accusations pesant sur le jeune homme ont finalement poussé l'Académie des César à le retirer de la liste des 32 révélations pour la cérémonie 2023 tandis que, dans le même temps, la projection du film fait débat dans certains cinémas.

Le Concorde, à la Roche-sur-Yon (Pays de la Loire), a fait le choix de le déprogrammer comme son propriétaire l’avait déjà fait pour J'accuse de Roman Polanski en 2019. L’équipe des Bonimenteurs, à la tête des salles de Jonzac, Montmoreau et Barbezieux, ont pris la même décision :

« Nous sommes conscients que cette décision puisse faire débat car il y a toujours ‘la présomption d’innocence’. C’est un sujet tristement d’actualité et qui ne peut pas être passé sous silence. Nous tenons à marquer notre solidarité avec toutes les femmes victimes de ces prédateurs en décidant de déprogrammer ce film. »

Au cinéma L’Écran de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), la question a tourmenté son directeur qui, lui aussi, a décidé de retirer Les Amandiers de l’affiche :

« Finalement, je le mets de côté le temps d’organiser un temps de parole, de réflexions pour l’accompagner. Je n’appelle pas à la censure mais défends la liberté d’expression dans les deux sens. Qu’on le veuille ou non, le film est entré dans le débat public. En concertation avec la présidente de l’association, nous avons décidé de retirer temporairement le film de notre programmation. Ce n’est pas ici un appel à la censure du film […]. »

De son côté, Valeria Bruni-Tedeschi a publié un communiqué dans lequel elle dénonce « un pur lynchage médiatique, procédé très éloigné d’une volonté d’informer de façon objective et impartiale ». Pour sa part, le distributeur du film Ad Vitam a pris l'initiative d'adresser un courrier aux exploitants de cinéma dans lequel il indique :

« Nous avons bien conscience que le film connaît aujourd’hui des tourments suite aux articles parus dans la presse ces derniers jours. [...] Nous imaginons que vous risquez d’être confrontés à certaines questions et réactions de votre public. Vous pouvez bien sûr entourer la diffusion du film de toute précaution qui vous semblerait opportune (discussion avec le public, indication sur l’enquête en cours…). Les Amandiers est une œuvre collective. […] Il nous semblerait normal que ce film puisse poursuivre sa vie en salles. Mais sachez que face à cette situation, nous comprenons et respectons toutes les positions et décisions que vous prendrez quant à l’exploitation du film dans votre salle. Cette décision appartient à chacun d’entre vous. »