Terrifier 3 sera interdit aux -18 ans en France

Le 4 octobre 2024, ESC Éditions, Shadowz Films et Factoris Films annoncent d’une même voix sur les réseaux sociaux que la commission de classification des œuvres cinématographiques vient tout juste de proposer d’interdire Terrifier 3 (Damien Leone, 2024) aux moins de 18 ans. Surpris, mécontents mais résignés, les distributeurs expliquent qu’ils se plieront à la décision de la Commission, qu’ils ne comprennent pas, le calendrier contrariant l’option d’un recours dont l’issue, même favorable, interviendrait bien trop tardivement (la sortie en salles étant programmée le 9 octobre prochain) : « Terrifier 3 est un film d’auteur s’inscrivant dans la plus pure tradition du genre dit slasher, à la violence parfaitement grand-guignolesque et irréaliste. Le film ne se prend jamais au sérieux, et nous savons que les spectateurs auront toute la distance, toute la maturité nécessaires pour comprendre et appréhender cette démarche artistique. »

Les distributeurs s’interrogent : « La décision de la Commission est d'autant plus étonnante que le comité avait formulé un avis moins sévère. Nous pensions obtenir une interdiction aux moins de 16 avec avertissement comme ce fut le cas il y a deux ans avec The Sadness », et précisent : « Tous les choix seront arrêtés d'ici lundi midi. Donc, même si nous le voulions, la décision finale de la ministre interviendra trop tard, la nouvelle Commission ne pouvant se réunir au mieux que mardi prochain. » Et hors de question de s’autocensurer : « C'est inenvisageable pour nous et contraire à l'essence même du cinéma que nous souhaitons défendre. »

Rappelons ici la procédure de classification :

En application du Code du cinéma et de l’image animée, la ministre chargée de la Culture dispose du pouvoir de délivrer un visa obligatoire autorisant une œuvre cinématographique à être exploitée en salles partout en France. Pour l’aider, le Code du cinéma institue une commission administrative chargée de l’assister et de rendre un avis sur chacune des œuvres proposées. Deux soirs par semaine, la commission de classification procède à la projection des films renvoyés devant elle par les comités.

Si elles sont obligatoires, les propositions formulées par la Commission (visa tous publics, visa assorti d’une interdiction aux moins de 12, 16 ou 18 ans avec ou sans inscription sur la liste des films à caractère pornographique ou incitant à la violence, et interdiction totale) ne lient pas la ministre. À la lecture des avis émis par la Commission et les comités, la minsitre décide seule de la classification des films avant leur exploitation en salles. Avant de statuer, elle a toutefois la faculté de demander un nouvel examen. La ministre transmet alors au président de la Commission les motifs de sa demande ainsi que toutes les observations utiles.

Si la ministre n’est pas tenue de suivre l’avis qui lui a été proposé, elle a néanmoins l’obligation de demander un second examen de l’œuvre si elle souhaite aggraver la proposition initiale. La décision ministérielle de classement est ensuite notifiée au distributeur qui peut saisir le ministre sous la forme d’un recours gracieux (le plus souvent un nouvel examen), ou bien la contester devant le juge.

Pour mémoire, Terrifier 2 a été interdit aux moins de 16 ans en décembre 2022, la Commission justifiant à l'époque sa décision par le fait que « le film enchaîne les scènes sanglantes, insiste sur les éviscérations, énucléations, tortures, de façon gratuite et pour le seul plaisir de provoquer le dégoût ».

On attend donc maintenant de lire la motivation de l’interdiction aux mineurs de Terrifier 3 – lequel est également interdit aux moins de 18 ans en Allemagne, en Australie, en Irlande, aux Pays-Bas, en Norvège, au Royaume-Uni ou encore en Russie – l’article R.211-12 du Code du cinéma précisant depuis 2017 qu’une telle restriction peut-être décidée « lorsque l’œuvre ou le document comporte des scènes de sexe ou de grande violence qui sont de nature, en particulier par leur accumulation, à troubler gravement la sensibilité des mineurs, à présenter la violence sous un jour favorable ou à la banaliser, le visa d’exploitation ne peut s’accompagner » que d’une interdiction aux mineurs. L’article ajoute que seul « le parti pris esthétique ou le procédé narratif sur lequel repose l’œuvre ou le document peut justifier » que le film ne soit pas classé dans la catégorie des films à caractère pornographique ou d’incitation à la violence.

Si Saw 3D : Chapitre final (Kevin Greutert) est le dernier film d’horreur interdit aux mineurs après un arrêt du Conseil d’État en 2015 (le film ayant été interdit aux moins de 16 ans avec avertissement à sa sortie en salles en 2010), Frig (Antony Hickling) et Caniba (Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor) étaient les derniers longs-métrages interdits aux moins de 18 ans en 2018.