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CENSURE & CINEMA

CENSURE & CINEMA

Collection Darkness, censure et cinéma


Les producteurs du film A Genoux les gars, sélectionné à Cannes dans la section Un certain regard, contestent son interdiction aux -16 ans

Publié par darkness-fanzine.over-blog.com sur 4 Mai 2018, 10:01am

Catégories : #censure, #cinéma, #interdiction, #A genoux les gars, #commission, #16 ans

Présenté dans la section Un certain regard au prochain Festival international du film de Cannes qui commencera dans quelques jours, A Genoux les gars (Antoine Desrosières, 2018) raconte l'histoire de deux sœurs de confession musulmane âgées de 17 et 18 ans, Yasmina et Rim, dont l'une fait la connaissance de Salim, le meilleur ami du petit-ami de l'autre. Avec lui, elle s'ouvre allant jusqu'à envisager la possibilité d'une sexualité hors mariage. La relation vire alors rapidement au chantage à la sextape, Salim profitant de certaines vidéos pour menacer Yasmina qui se réfugie auprès de sa sœur laquelle, au lieu de la défendre, lui reproche ses agissements et la rejette.

 

Inspiré d'un fait réel, le scénario, qui raconte le parcours d'une femme vivant en banlieue, de la soumission à l'émancipation, a conduit la commission de classification des œuvres cinématographiques à proposer au ministre de la Culture une interdiction aux mineurs de 16 ans le 29 mars 2018 : « Interdiction aux mineurs de moins de 16 ans pour ce film qui traite sur le mode humoristique des relations, en particulier sexuelles, entre jeunes gens présentés comme mineurs. L’accumulation de stéréotypes autant que la banalisation de comportements problématiques ne sont pas toutefois adaptées à un public jeune ou pré-adolescent susceptible d’être heurté et de se méprendre sur ces situations. »

 

On apprend aujourd'hui que les producteurs du long-métrage distribué par Rézo Films, qui sortira en salles le 20 juin 2018, viennent de demander au ministre de reconsidérer sa décision. Rappelons que si le ministre n'est pas tenu de suivre l'avis qui lui a été proposé, il a l'obligation de demander le réexamen de l'œuvre par la Commission s'il souhaite aggraver la proposition initiale. La décision ministérielle de classement est ensuite notifiée au producteur qui peut demander un nouvel examen ou la contester devant le juge. Dans son avant-dernier rapport d'activité, la Commission de classification précise que sept longs-métrages et un court ont fait l'objet d'un second examen à la demande du producteur ou du distributeur jugeant la classification trop sévère, sur la période 2010-2012.

 

Interrogé sur le niveau d'interdiction décidé pour A Genoux les gars, Antoine Desrosières - à qui l'on doit  A la belle étoile (1993), Banqueroute (2000) et les courts-métrages Un Bon bain chaud (2010) et Haramiste (2014) - regrette que les spectateurs auxquels le film est destiné, ne puissent pas aller le voir au cinéma :

 

« Il est reproché au film de faire une comédie sur le viol. Il est craint par la Commission que les moins de 16 ans minorent la gravité de l'acte à cause de la comédie. Alors que le consentement, tel qu’il est compris par les personnages selon qu’ils soient des filles ou garçons, est le sujet de fond que le film propose de donner à débattre au public pour lequel il a été imaginé, c'est-à-dire celui des adolescents aux prises avec ces questions.

 

Le film adapte à l'écran un témoignage vécu, écrit avec les actrices/scénaristes Souad Arsane et Inas Chanti, Anne-Sophie Nanki et moi-même. A Genoux les gars a été pensé comme un outil support ayant vocation de libérer la parole d’un public jeune, peu coutumier de se reconnaître au cinéma.

 

La comédie, loin de relativiser la gravité des abus décrits dans le film, vise à mettre en évidence son absurdité. Sans prétendre être à sa hauteur, Kundera disait à propos de Milos Forman (une occasion de rendre hommage à un génie récemment disparu n’est jamais à négliger) : ''L'humour jaillit d'une crevasse qui s'est ouverte entre ce que les choses prétendent signifier et ce qu'elles sont en réalité. […] Rien ni personne n'est dispensé du comique qui est notre condition, notre ombre, notre soulagement et notre condamnation''.

 

A quoi donc sert le cinéma ? A dire ce qu’il faut penser ou à poser des questions ? Les jeunes de moins de 16 ans qui ont le droit de vivre des situations compliquées, dans les larmes mais aussi dans le rire, ne devraient-ils pas avoir celui de voir des films qui leur permettent de les appréhender dans toute leurs complexités et leurs nuances ? Vous vous ferez votre propre avis en voyant le film. Et espérons que la Commission se pose les questions dans le bon sens lors du recours. »

 

On attend désormais la décision du ministre.

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T
Genre les ado vont aller voir son film...
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