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CENSURE & CINEMA

CENSURE & CINEMA

Collection Darkness, censure et cinéma


Le dernier film de Jean-Claude Brisseau a-t-il été économiquement censuré ?

Publié par darkness-fanzine.over-blog.com sur 12 Janvier 2018, 13:42pm

Catégories : #censure, #cinéma, #interdiction, #Cinémathèque française, #Que le diable nous emporte, #Jean-Claude Brisseau, #commission

Que le diable nous emporte (2018), le dernier film de Jean-Claude Brisseau sorti sur les écrans français le 10 janvier 2018, était attendu autant pour de bonnes que de mauvaises raisons, comme l'explique August Tino le 9 janvier dernier : « Bonnes car ses films sont des objets filmiques assez uniques dans le paysage cinématographique français, mélangeant réalisme poétique et drame social mâtine d’érotisme subversif. Mauvaises car depuis sa condamnation, il est dans la ligne de mire des féministes, comme si la justice n’avait jamais rendu de verdict. Sous la pression sa rétrospective à la Cinémathèque française a été ajournée. » C’est dans ce climat que la Commission de classification a rendu son avis le jeudi 21 décembre 2017, suivi par la ministre de la Culture : « Interdiction aux mineurs de moins de douze ans en raison de nombreuses scènes à caractère érotique susceptibles de heurter la sensibilité du jeune public. »

 

Depuis mercredi, une quinzaine de salles en France projette la version 2D du film, comme l'explique Olivier Rossignot le 10 janvier : « Jean-Claude Brisseau nous [...] parle des raisons pour lesquelles il a opté pour la 3D pour ce long métrage. Toujours fougueux, il évoque également la manière dont son cinéma ne cesse de se nourrir de ses réflexions sur le monde, la morale et la sexualité. Suite à l’annulation de sa rétrospective à la Cinémathèque peu de cinémas ont osé prendre le film. Aucun spectateur ne pourra donc le voir en 3D en salles. Il nous semblait plus que nécessaire de défendre l’un des plus grands cinéastes français en activité en cette période où la censure reprend ses droits. Hasard symbolique du calendrier, nous avons effectué l’interview le jour même où devait s’ouvrir la rétrospective. »

 

Rappelons qu'après la polémique engendrée par la rétrospective Roman Polanski au mois d'octobre 2017, la Cinémathèque a annoncé le mercredi 8 novembre le report sine die de la rétrospective consacrée à Jean-Claude Brisseau, le réalisateur de Noce blanche (1989) condamné en 2005 pour le harcèlement sexuel de deux jeunes actrices qui espéraient décrocher un premier rôle dans son long métrage Choses secrètes (2002) : « Dans un souci d’apaisement, Costa-Gavras, président de La Cinémathèque française, a décidé de repousser la rétrospective consacrée à Jean-Claude Brisseau, initialement prévue en janvier 2018. Il espère qu’elle pourra se tenir très prochainement, dans un climat plus serein et plus propice à la bonne réception de cette œuvre importante du cinéma français. »

 

Sur culturopoing.com, Olivier Rossignot interroge le cinéaste sur son rapport à la censure, et revient sur certaines de ses œuvres. A la question « Vous sentez-vous vous en phase avec l’époque ? Vit-on une période de perte de spiritualité et vide culturel ou au contraire une période de quête ? », Jean-Claude Brisseau répond : « Je ne peux pas répondre de façon aussi vaste que ça. Je pense de toute façon que la vie a en général quelque chose de spécifiquement tragique. La recherche du bonheur et de la liberté, on l’a tous, mais qu’est-ce que le bonheur et la liberté ? On en sait fichtrement rien, si on veut le définir. On n’a pas tous les mêmes moyens pour vivre. J’ai toujours été à la fois marxiste et freudien. Je suis nuancé par rapport à ces questions. J’estime peut-être avoir eu de la chance. Mais vous savez, j’étais beaucoup plus heureux quand j’étais enseignant qu’en faisant du cinéma. J’ai enseigné, parce que je l’avais demandé, dans les classes d’enfants difficiles. Quand j’ai fait De Bruit et de fureur, tout le monde, surtout à gauche, m’a attaqué. Et quelques années après, on disait que j’avais été prophétique. Même à cette époque, je mettais tout mon argent à réaliser des tout petits films, ça me permettait d’extérioriser mes problèmes pour ne pas dire les sublimer. Je dis toujours à ceux qui font des professions artistiques qu’ils ont cette chance de pouvoir extérioriser par l’exercice de leur art, alors que ceux qui ne l’ont pas peuvent souvent être condamnés à souffrir. Pour arriver à un minimum de sublimation, il faut selon moi rentrer dans le langage. Les arts vous permettent quand vous les pratiquez de façon active, ou passive en tant que spectateur de retrouver vos douleurs, mais d’une manière qui aide à vivre. »

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