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CENSURE & CINEMA

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Collection Darkness, censure et cinéma


Pourquoi le niveau d'interdiction d'un film est-il parfois plus sévère à la télévision ?

Publié par darkness-fanzine.over-blog.com sur 10 Juillet 2016, 07:40am

Catégories : #csa, #télévision, #mineurs, #interdiction, #film, #cinéma censure, #jeunesse, #protection

Pourquoi le niveau d'interdiction d'un film est-il parfois plus sévère à la télévision ?

Le niveau de classification d'un film décidé par le ministre de la Culture pour sa projection en salles va conditionner l'heure de sa diffusion pour un passage à la télévision, car celle-ci sera fonction de sa classification dans l'une des cinq catégories définies par le conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) en 1996 : la catégorie I pour les programmes destinés à tous les publics ; la catégorie II pour les programmes susceptibles de heurter les mineurs de 10 ans, qui ne peuvent être diffusés dans les émissions destinées aux enfants ; la catégorie III pour les œuvres cinématographiques interdites aux -12 ans et les programmes qui recourent de façon répétée à la violence physique ou psychologique ou qui évoquent la sexualité adulte, ne peuvent être diffusés avant 22 heures ; la catégorie IV pour les œuvres cinématographiques interdites aux -16 ans, et les programmes à caractère érotique ou de grande violence susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs de 16 ans, ne peuvent être programmés qu'entre 22h30 et 5 heures ; et enfin la catégorie V pour les œuvres cinématographiques interdites aux -18 ans, et les programmes pornographiques ou de très grande violence, réservés à un public adulte averti, qui peuvent nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, ne peuvent être diffusées qu’entre minuit et 5 heures du matin par les chaînes accessibles par abonnement, dont celles de cinéma et de paiement à la séance dans la mesure où elles mettent en place un système de verrouillage permettant d’éviter que des mineurs y aient accès.

Dans un article mis en ligne sur le site bfmbusiness.bfmtv.com le 9 juillet dernier, Jamal Henni dénonce ce système, et qualifie même le CSA de « père la pudeur » : « Le gendarme de l'audiovisuel applique aux films diffusés à la télévision une classification plus restrictive que celle utilisée lors de la sortie en salles. […] Le choix [de l'âge] est effectué par la chaîne. Toutefois, un contrôle après diffusion du film est effectué par le CSA. Si ce dernier estime que la chaîne a été trop laxiste, alors il peut taper sur les doigts de la chaîne, sous la forme d'un courrier, ou, plus rarement, sous la forme d'une sanction » comme il l'a fait par exemple à l'encontre de la chaîne Antenne Réunion (décision CSA, assemblée plénière du 25 septembre 2007) après la diffusion, le 14 juin 2007 à 19 h 55 du film La Proie de J-F. Lawton, accompagné d'une signalétique de catégorie II (déconseillé aux moins de 10 ans) alors que, pour sa sortie en salles, le film avait fait l'objet d'une interdiction aux -12 ans. Même chose le 19 février 2009 (décision CSA, assemblée plénière du 24 novembre 2009) à l'endroit de Ciné Cinéma Premier après la diffusion à 22 heures du film Apocalypto de Mel Gibson, avec une signalétique de catégorie III (déconseillé aux moins de 12 ans) alors que, selon le CSA, les très nombreuses scènes de violence qu'il comporte justifiaient une classification en catégorie IV (déconseillé aux moins de 16 ans). Une dernière décision qui peut surprendre, puisque bien plus sévère que celle de la Commission de classification qui avait proposé au ministre une interdiction aux -12 ans pour sa sortie en salles en janvier 2007 : « La Commission recommande pour ce film une interdiction aux mineurs de moins de douze ans, en raison des très nombreuses scènes de violence. »

Cette rigueur est justifiée et expliquée par le CSA dans son rapport annuel en 2007 : « Le CSA veille à ce que la classification attribuée aux films lors de leur sortie en salles soit renforcée par les chaînes de télévision lors de la diffusion de l’œuvre à la télévision, lorsque cela est nécessaire, comme le prévoit l’article 2 de la recommandation du 7 juin 2005 sur la classification des programmes et la signalétique jeunesse. Cela se justifie par la nécessaire prise en compte du contexte de visionnage, différent au cinéma et à la télévision, et par la portée de chacune de ces mesures de classification. Dans le cas d’une projection en salles, le téléspectateur effectue la démarche de se rendre au cinéma, alors qu’une diffusion à la télévision accroît le risque d’exposition des mineurs à des programmes qui ne leur sont pas adaptés, ce qui peut justifier un éventuel renforcement de la classification. Par ailleurs, alors que le visa pris par le ministre de la Culture conditionne le droit d’accès des mineurs aux salles de projection et qu’il peut énoncer une interdiction d’accès, la signalétique apposée par les chaînes consiste simplement à déconseiller certains programmes et à adapter l’horaire de diffusion à leur contenu, mesure moins contraignante par ses effets et qui peut donc justifier une classification plus protectrice du jeune public. »

Une position claire richement illustrée par Jamal Henni dans son article : « C'est ce qui est arrivé aux Kaïra de Franck Gastambide, que le CSA déconseille aux -12 ans "compte tenu de la crudité du langage, de la présence de plusieurs scènes à caractère sexuel et de l’évocation de l’univers de la pornographie". De même, pour le teen movie américain Supergrave, produit par Judd Apatow, en raison de "scènes et propos à connotation sexuelle", dixit le CSA. Ou encore Polisse de Maïwenn, car il parle "pédophilie, inceste, mariage forcé et prostitution". Idem pour le polar 7h58 ce samedi là, de Sidney Lumet, en raison de "scènes de violence, qui se déroulent dans un cadre familial". Ou encore le film d'espionnage Mensonges d’État de Ridley Scott, en raison de "scènes de torture". Ou bien le film de guerre Les messagers du vent, de John Woo, à cause de "scènes de combats très réalistes". Même punition pour Le Serpent, d'Eric Barbier, au prétexte du "climat angoissant, des scènes de violence et de l'implication d'enfants mis en danger". Ou encore le thriller Harry, un ami qui vous veut du bien, de Dominik Moll, au prétexte de "scènes et situations angoissantes". »

Une situation vivement critiquée par les professionnels du cinéma, tel Gaspar Noé durant les 25èmes Rencontres cinématographiques de Dijon en octobre 2015 : « Sous un gouvernement de droite comme celui de Giscard, je voyais à 20h30 à la télévision des films comme Délivrance, Taxi Driver, Les Chiens de paille ou Portier de nuit. Il y avait juste un petit carré blanc. A l'époque, la télé prenait les gens pour des adultes. Des millions des gens les ont vus. La France s'en est très bien portée... »

Retrouvez l'article complet ICI.

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