De Love à Nymphomaniac
Après deux avis de la Commission de classification des œuvres cinématographiques, Love (Gaspar Noé, 2015) a été interdit aux moins de 16 ans par la ministre de la Culture et de la Communication en juillet 2015. Un visa suspendu par le juge des référés du tribunal administratif de Paris quinze jours plus tard, ce dernier estimant que les nombreuses scènes décrivant des corps et des sexes en action imposaient une interdiction à tous les mineurs. Le 30 septembre 2015, le Conseil d’État confirmait cette décision et se faisant, s’est inscrit dans la continuité de celles qui ont été prononcées en 2014 puis en 2016, suspendant puis annulant les visas des versions longues et courtes de Nymphomaniac volume. 1 (l'interdiction passant de 12 à 16 ans pour la version courte1, puis de 16 à 18 ans pour la version longue2) et Nymphomaniac volume. 2 (l'interdiction passant de 16 à 18 ans pour les deux versions3) de Lars von Trier.
L'interdiction aux mineurs de Nymphomaniac
Les recours qui avaient été déposés contre les arrêts relatifs aux visas attribués à Nymphomaniac Volume 1 et Volume 2 viennent d'être examinés par le Conseil d'Etat. Le blog ecrannoir.fr nous apprend que le 28 juillet 2017, la Haute Juridiction a rejeté le pourvoi du ministre de la Culture mais aussi celui des associations Promouvoir et Action pour la dignité humaine. La version longue du Volume 1 a donc temporairement perdu son visa d'exploitation tandis que le Volume 2 peut en revanche conserver le sien.
Ce faisant, le Conseil d'État confirme la décision de la cour administrative d'appel de Paris du 16 juillet 2016 : toutes les versions de Nymphomaniac doivent être interdites aux moins de 18 ans, à l'exception de la version courte du Volume 1.
Rappel des épisodes précédents
En 2016, la cour administrative d’appel de Paris a été saisie de plusieurs recours concernant les quatre visas d’exploitation attribués au film Nymphomaniac volumes 1 et 2 par la ministre de la Culture et de la Communication pour les versions longues et courtes de l’œuvre controversée de Lars von Trier.
On se souvient que le juge des référés du tribunal administratif de Paris avait suspendu le 28 janvier 2014 le visa d'exploitation du film Nymphomaniac volume 1, estimant à l'époque que l'interdiction aux moins de 12 ans était insuffisante. Même chose le 5 février 2014 pour le visa interdisant le Volume 2 aux seuls mineurs de 16 ans.
Le tribunal administratif de Paris a ensuite annulé les deux visas d’exploitation attribués aux versions courtes le 16 juillet 2014, conduisant la ministre à ré-hausser le 9 mars 2015 leur niveau d’interdiction respectivement aux mineurs de 16 ans, pour le Volume 1, et à tous les mineurs, pour le Volume 2.
Le 14 janvier 2016, le même tribunal a validé les deux visas d’exploitation attribués aux versions longues interdisant la diffusion aux moins de 16 ans, s’agissant du Volume 1, et à l’ensemble des mineurs, concernant le Volume 2.
Vous suivez toujours ?
Le 12 juillet 2016 la cour administrative d'appel de Paris a, dans deux arrêts publiés :
annulé - à la demande des associations Promouvoir et Action pour la dignité humaine représentées par Maître Bonnet - le visa accordé par Fleur Pellerin le 9 mars 2015 interdisant la version longue du Volume 1 aux spectateurs de 16 ans, décision pourtant validée par le tribunal administratif de Paris le 14 janvier 2016 ;
rejeté le recours formé par le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) qui demandait l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 16 juillet 2014 - qui censurait les visas des versions courtes accordés aux Volumes 1 et 2 du film de Lars von Trier - pour le préjudice grave causé « aux intérêts de l’ensemble des producteurs cinématographiques ».
Ce qu'il faut retenir
A l'instar de la décision du Conseil d’État du 30 septembre 2015 annulant le visa d'exploitation de Love en tant qu'il n'interdisait pas sa représentation à tous les mineurs, le Conseil d'Etat confirme la réponse apportée par la cour administrative d'appel de Paris en juillet 2016, et réaffirme qu’une œuvre qui comporte des scènes de sexe non simulées doit nécessairement être interdite aux moins de 18 ans.
En l'espèce, estimant que les scènes de sexe non simulées « sont filmées en gros plan, de manière parfaitement réaliste et appuyée, sans aucune dissimulation des organes génitaux des personnages [mais que] compte tenu de la manière dont il est mis en scène, [le film] ne présente pas de caractère pornographique », les juges ont considéré que la ministre aurait dû interdire la version longue de Nymphomaniac volume 1 aux moins de 18 ans conformément au Code du cinéma et de l'image animée.
Le visa n° 134563 du 9 mars 2015 interdisant la version longue de Nymphomaniac Volume 1 aux moins de 16 ans, est donc définitivement annulé. Une version dorénavant temporairement sans visa d'exploitation en salles. La ministre doit donc prendre un nouveau visa interdisant la version longue du Volume 1 de Nymphomaniac, à tous les spectateurs mineurs et ainsi se conformer à la décision du Conseil d'Etat.
C'est bon ?
1 Trib. adm. Paris, n°1400339, 16 juil. 2014 (vers. courte) ; n°1504253-1504995/5-1, 14 janv. 2016 (vers. longue).
2 Cour adm. appel Paris, n°16PA00287, 12 juil. 2016 (vers. longue).
3 Trib. adm. Paris, n°1400922/5-1, 16 juil. 2014 (vers. courte) ; et n°1503175/5-1, 14 janv. 2016 (vers. longue).